Voici quelques informations-clés à retenir de l'article d'Hervé Platel et Fabrice Chardon (2018) : « Quand l'art répare le cerveau » paru dans le magazine : Cerveau&Psycho (n°98).
L’art-thérapie se fonde sur des pratiques variées : musique, dessin, peinture, théâtre, danse…
Elle a de multiples effets positifs, allant de la rééducation motrice à l’amélioration de l’humeur et de l’estime de soi.
De ce fait, elle est prescrite pour des pathologies très diverses, à tous les âges.
Ses bienfaits résultent du plaisir et de la satisfaction éprouvés à réaliser de « belles » œuvres, elle encourage également à aller vers les autres, mais aussi, dans certains cas, elle permet de réels changements neuroplastiques dans le cerveau.
En effet, les dernières études montrent que l'art a le pouvoir de stimuler la neuroplasticité, à travers la sollicitation des sensations et des émotions, ainsi que la motricité.
Les bienfaits de l'art-thérapie ont été démontrés sur : la confiance et l’estime de soi, la motricité et l'image du corps, la mémoire, le stress et l'anxiété (diminution du cortisol, hormone du stress), etc...
Donc une pratique thérapeutique par les arts permet d’assister des patients victimes de pathologies ou situations très variées comme :
Burn-out
Cancers / leucémie
Difficultés dues au vieillissement
Grande précarité
Handicaps cognitifs ou moteurs
Maladie d'Alzheimer / démences
Mucoviscidose
Obésité
Soins palliatifs
Troubles du comportement
...
Voici quelques exemples concrets d'actions bénéfiques par l'art-thérapie.
Handicaps moteurs et cognitifs (par exemple suite à un AVC ou un traumatisme crânien) :
Avec des séances d'écoute musicale, l'art-thérapie joue sur tous les tableaux : la rééducation cognitive et motrice, mais aussi sur l'amélioration des capacités de concentration, la mémoire verbale et l'humeur (score de dépression réduit de moitié).
La musique agirait grâce à 2 mécanismes :
En stimulant les circuits cérébraux du plaisir, entraînant une libération de dopamine (substance qui accroît l’attention, l’éveil, la vitesse de traitement de l’information et la mémorisation).
En modifiant la plasticité cérébrale et en favorisant l’établissement de nouvelles connexions neuronales grâce à la production de certaines protéines. Comme elle active de vastes réseaux cérébraux (impliqués dans l’attention, le traitement sémantique, la mémoire, etc), elle pourrait aider à la reconfiguration neuronale autour des zones lésées.
L’art remodèle le cerveau, car il a la capacité de stimuler la plasticité cérébrale.
Mais pour la rééducation motrice, en revanche, la simple écoute ne suffit pas, il faut passer à des pratiques plus actives (jouer d'un instrument, collage, peinture, sculpture, danse, etc...) pour affiner ses gestes.
Par exemple pour des patients atteints d'une parésie d'une de leurs mains (c’est-à-dire une difficulté à mouvoir ce membre et une grande fatigue musculaire), une technique fondée sur le piano permettrait une amélioration notable de la motricité (+20%).
Elle serait même plus efficace que d’autres méthodes de rééducation motrice, grâce au feedback auditif (musique produite), qui permet au patient de corriger très vite ses mouvements.
Les chercheurs ont ainsi constaté que le cortex moteur se réorganisait : les neurones devenaient plus facilement excitables et la zone commandant la main se déplaçait en dehors de la région lésée.
De plus, ils ont observé de nombreuses améliorations sur la qualité de vie comme : l’humeur, le rôle social et la productivité (augmentée de 21%).
Chez les personnes ayant suivi un programme d’orthophonie musicale, il a été constaté de notables améliorations dans la compréhension de la parole et dans sa production (aires de Broca et Wernicke) donc dans leur communication, d’où les progrès du langage.
Des phénomènes de reconfiguration cérébrale sous-tendent donc bien la récupération cognitive.
Maladie d'Alzheimer ou démences :
Objectifs des séances d'art-thérapie :
Permettre à ces patients, qui ont souvent des difficultés de langage, d’exprimer ce qu’ils ressentent. En effet, il est estimé que 70 à 90 % d’entre eux ont des perturbations de l’humeur à mesure que la maladie progresse : nervosité, colère, anxiété, symptômes dépressifs… Leur incapacité à exprimer ces émotions par la parole aggrave leur frustration. Dans ce contexte, dessiner ou peindre permet de les extérioriser. En effet, les séances d’art-thérapie améliorent certaines capacités cognitives, comme une meilleure focalisation de l’attention pendant les séances et une amélioration de la « fluence verbale » (la capacité à parler sans hésitation ou répétition).
Retrouver un certain plaisir de vivre, car planifier les différentes étapes d’une réalisation permet en quelque sorte de regarder vers l’avenir et de se projeter. À l’issue de la prise en charge en art-thérapie, la confiance en soi s’est améliorée, ainsi qu'une amélioration globale de la qualité de vie et d'une baisse de l’apathie chez ces personnes. De même, cela leur a permis de recréer du lien avec le monde extérieur et d'éviter de se replier sur eux-mêmes, car un art qui laisse une trace aide aussi à surmonter le sentiment de précarité de l’existence.
Concernant le vieillissement :
Les problèmes d’équilibre entraînent souvent des chutes dangereuses chez les personnes âgées.
Hors la danse en plus d'augmenter le volume d'une zone cérébrale impliquée aussi bien dans l’apprentissage que dans la navigation spatiale, permet également d'améliorer l’équilibre postural.
De plus, certaines études démontrent que les musiciens professionnels âgés réussissaient mieux divers tests cognitifs que des musiciens amateurs, eux-mêmes obtenant de meilleurs résultats que des non musiciens.
La pratique d’un instrument favoriserait ainsi la mise en place d’une réserve cognitive, c’est-à-dire de réseaux cérébraux capables de compenser le déclin de certaines régions grâce à des mécanismes de neuroplasticité.
En soins palliatifs ou en oncologie :
L'état psychologique des patients a été évalué avant et après les sessions d'art-thérapie grâce à un questionnaire mesurant 6 symptômes sur une échelle de 0 à 10 : la douleur, l’anxiété, le sentiment d’être malade, la fatigue, la tristesse, la dépression.
Les résultats ont été spectaculaires : chaque session se traduisait par une atténuation de ces symptômes et par une baisse de 47 % de la détresse globale, qui représente la moyenne de tous les symptômes (attention toute fois, les bénéfices étaient très variables selon les patients).
C’est la dimension du « bon » (plaisir éprouvé lors de la réalisation) qui est la plus liée à la réduction de la détresse globale.
Le plaisir éprouvé lors de la séance artistique semble donc une cause majeure de ses bienfaits, permettant d’oublier un instant la maladie.
D’autres études ont d’ailleurs révélé que les activités artistiques activent le circuit de la récompense dans le cerveau. Elles pourraient aussi entraîner le relâchement d’endorphines (antidouleur naturel).
La baisse de l’anxiété s’expliquerait également par une augmentation de l’estime de soi. Elle est particulièrement liée à l’évaluation de la dimension du « bien réalisé ».
Ainsi, quand le patient se sent capable de bien faire quelque chose, de maîtriser une technique, ce sentiment l’accompagne et le rassure, car cela lui permet de se remobiliser à travers un projet valorisant.
Cela améliore également sa qualité de vie notamment ses relations avec sa famille et l’équipe médicale. Sa motivation et son estime de soi progressent également tout comme sa résilience.
L'augmentation de la résilience est due au renforcement des connexions entre diverses régions du cerveau grâce à la stimulation récurrente par l'art.
Ce vaste réseau cérébral mobilisé (en particulier la zone-clé pour la régulation émotionnelle) est associé à toute une série de fonctions cognitives comme l'introspection, l'attention portée à ses émotions et ses souvenirs… d’où ses effets bénéfiques sur la résilience.
De plus, des études ont démontré que de simples séances passées à écouter de la musique relaxante ont un effet antalgique et permettent de diminuer jusqu’à 40 % les doses de médicaments.
Ce qui est particulièrement intéressant dans les soins palliatifs, car il arrive un moment où l’état des patients ne leur permet plus les techniques actives.
Bien sûr, l’effet antidouleur d’une séance d’art-thérapie est temporaire, mais tout comme les médicaments antalgiques.
En conclusion, l’art-thérapie pourrait donc irriguer tous les secteurs du soin.
En effet, les scientifiques commencent tout juste à expliquer les pouvoirs thérapeutiques de l’art, alors que ses adeptes les connaissent depuis bien longtemps...
Mots-clés : Arts, Bienfaits, Cerveau, Pathologies, Plasticité
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